16 Couleurs

16 Couleurs – graphisme & jeu vidéo


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Portfolio: Crazy Planets (2009)

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Jusqu’en 2010 le paysage du jeu sur Facebook était très différent de ce qu’il est devenu par la suite. Aucune des sociétés présentes sur le marché n’était ni très grosse ni très rentable, les techniques de monétisation du free-to-play restaient balbutiantes et les préconceptions sur ce que devait ou ne devait pas être un jeu Facebook encore peu présentes. Par conséquent l’environnement était très propice aux expérimentations plus ou moins loufoques dans l’espoir d’être les premiers à découvrir le genre de jeu qui fonctionnerait bien sur la plateforme. Pour ma part,  j’avais en 2008 rejoint le studio norvégien de Playfish, à la situation géographique assez improbable puisque situé à Tromsø, une petite ville située tout au nord du pays, à 350 km au delà du cercle polaire, là où le soleil ne se montre pas pendant deux mois l’hiver mais en contrepartie ne se couche pas entre le 21 mai et le 21 juillet !

Tromsø

Tromsø. Pas mal, non ?

Crazy Planets - Play IconC’est dans ce contexte que naquit Crazy Planets, un jeu Flash de tir au tour par tour inspiré par le gameplay de Worms, à la différence que toutes les missions se déroulaient sur de minuscules planètes circulaires avec une gravité à l’avenant. Avec certaines armes un peu puissantes, il était donc possible de se blesser par mégarde en tirant un projectile qui ferait le tour de la planète ! On pouvait engager ses amis Facebook comme co-équipiers, ce qui permettait de coller leur photo de profil sur un des personnages de l’escouade et de rendre les combats cocasses à l’occasion, comme quand il fallait se résigner à sacrifier Jean-Christian Ranu de la compta pour terminer une mission. À cela s’ajoutait un léger aspect RPG avec des niveaux pour les personnages offrant davantage de points de vie et des armes à débloquer en collectant des matériauxUn mode multijoueur était prévu depuis le début et devait même constituer le cœur du jeu, la campagne solo ayant été ajoutée sur le tard quand il s’est avéré qu’il ne serait pas possible de construire un mode multijoueur dans les délais impartis.

L’équipe de développement fut limitée à deux personnes la plupart du temps, à savoir un programmeur (Bryan Gale, actuellement développeur indépendant préparant l’intrigant Induction) et moi-même pour toute la partie graphique hormis certaines décorations. J’avais aussi conçu la plupart des niveaux avec un éditeur maison et avais été impliqué dans le game design.

Ayant à peu près carte blanche pour les visuels, j’avais opté pour un thème qui m’est cher et qui était tout à fait en adéquation avec le type de jeu et le public visé : une science-fiction tendance rétro avec planètes inconnues, soucoupes volantes et robots un peu fous (ce qui avait également l’avantage de justifier l’intelligence artificielle basique de ces derniers !). Pour la direction artistique à proprement parler, je m’étais fixé deux objectifs : un style affirmé et accrocheur tout en restant très lisible, ciblant plutôt un public jeune en accord avec le gameplay, et comme Flash n’ayant jamais été réputé pour sa vitesse, une attention particulière aux performances du jeu qui m’a fait privilégier des formes simples sans fioritures inutiles et effets coûteux en temps machine.

Lancé mi-2009, Crazy Planets ne rencontrera qu’un succès commercial modeste malgré de bonnes critiques et même des versions pirates sur les réseaux VKontakte en Russie et Renren en Chine. Après être resté longtemps sans mise à jour, le jeu fut mis à la retraite forcée en 2012 lors d’un énième changement technique de Facebook qui aurait demandé de remanier trop de code pour être financièrement justifiable. Aujourd’hui Crazy Planets n’est pas tout à fait oublié puisqu’une poignée de fans continue de réclamer son retour plusieurs années après sa disparition. Quant au marché du jeu vidéo sur Facebook, la sorte d’explosion cambrienne que j’invoquais en introduction s’est arrêtée rapidement à partir du moment où Farmville s’est avéré être une machine à cash et, comme Clash of Clans ou Candy Crush Saga aujourd’hui, est donc subitement devenu la référence et le standard auquel tout nouveau concept serait jaugé et dont les mécanismes allaient être scrutés de manière obsessionnelle et imprégner des milliers de jeux.

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Interlude architectural : le brutalisme dans SimCity Social

En tant qu’ incarnation éphémère de la série de Maxis sur Facebook, SimCity Social avait nécessité la réalisation de bâtiments par palettes entières, en bon city-builder qu’il était. C’est d’autant plus le cas qu’il était free to play, catégorie de jeux pour laquelle un flux régulier de contenu inédit est souvent le nerf de la guerre. Lorsque j’ai quitté le studio de Playfish à Pékin pour cause de retour en Europe, l’équipe en avait réalisé plus de 400, mais le total a bien dû monter à 500 ou 600 jusqu’à ce qu’EA ne décide de débrancher le jeu définitivement en juin 2013.

Si la plupart des bâtiments étaient relativement classiques, une fonction du jeu nous avait permis de créer une petite série de constructions beaucoup plus mémorables. En effet, la visite de la ville d’un ami Facebook, grand classique des social games de l’époque, offrait la possibilité d’y réaliser des actions soit positives (comme arroser les fleurs), soit négatives (comme uriner dans les fleurs). Chaque action rapportait des points qui permettaient de débloquer des bâtiments « gentils », volontairement gnangnans, et « méchants » dans un style plus affirmé. Pour ces derniers l’inspiration principale avait été le style architectural appelé brutalisme, dont les deux mamelles sont le béton brut et les formes géométriques angulaires. À cela, on avait ajouté un habillage dans le style totalitaire des pires dictatures actuelles et passées.

simcity-social-brutalisme

Le temps qu’on avait pu y consacrer avait été limité, mais ces bâtiments furent parmi mes préférés et auraient mérité d’être plus développés. Ou même pourquoi pas un jeu entier avec une ambiance oppressive à la Papers Please et en 3D temps réel (Flash ne permettant pas d’utiliser autre chose que du précalculé à l’époque).


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Le jeu vidéo : un passe-temps futile, des sociétés pas très fiables ?

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EA a donc décidé de fermer le 14 juin prochain les derniers jeux Playfish encore présents sur Facebook : Pet Society (en ligne depuis presque 5 ans !), The Sims Social et SimCity Social, sur lequel j’avais travaillé avec le reste de l’équipe Playfish à Pékin. Un rapide tour sur les forums des jeux en question permet de se rendre compte que les joueurs sont quelque peu amers.

Peut-être que ces jeux étaient rentables, peut-être qu’ils ne l’étaient pas ; je ne dispose pas d’information à ce sujet. Généralement les jeux arrivés à ce stade de maturité ne nécessitent plus qu’une équipe réduite puisque l’objectif est plus de conserver les joueurs existants qu’en attirer de nouveaux. Dans tous les cas, EA peut parfaitement décider que les ressources affectées à ces jeux seraient plus productives en étant redirigées vers d’autres projets.

Néanmoins je ne peux m’empêcher de penser que cette décision aura des conséquences préjudiciables du point de vue des joueurs. Le free to play est largement présenté comme une planche de salut pour le jeu vidéo, permettant de toucher une population très large (en particulier les gens les moins enclins à se considérer comme joueurs) tout en limitant les problèmes de piratage. Ces nombreuses personnes qui ont découvert le jeu vidéo par les free to play sur Facebook ou smartphones risquent de déduire de la fermeture soudaine de titres comme Pet Society que s’investir financièrement ou intellectuellement dans un jeu est une perte de temps, puisque le produit est susceptible de disparaître corps et biens en l’espace de quelques semaines.

ByePetSocietyLa situation est exacerbée par le fait que les derniers jeux Playfish sont des «creative canvas», supports quasi-vierges sur lesquels le joueur va lentement créer son univers en décorant chaque pièce de sa maison ou en construisant une ville à son image. Le contexte est légèrement différent pour des jeux comme Candy Crush Saga ou Bejeweled Blitz, où l’on dépense avant tout pour finir l’aventure ou battre ses amis. On paye pour une expérience, pas pour construire quelque chose, et on peut donc toutes proportions gardées comparer cette décision avec celle d’acheter un ticket pour un concert ou un film, au résultat tout aussi intangible.

La finalité est différente dans The Sims Social ou SimCity Social (ou même le nouveau SimCity, pour lequel le même problème se posera tout ou tard), jeux sans objectif clairement défini, où l’on paye surtout pour bâtir quelque chose. Si ce quelque chose disparaît brutalement, cela revient à démontrer à une génération de nouveaux joueurs que le jeu vidéo est un passe-temps futile proposé par des entreprises auxquelles on ne peut pas vraiment faire confiance. C’est tout comme si on leur indiquait qu’ils feraient mieux de passer à autre chose s’ils ne veulent pas perdre leur temps et leur argent. L’idée est tout à fait justifiable d’un point de vue philosophique (après tout il est sûrement plus enrichissant de passer ses soirées à écrire des poèmes ou à peindre à l’aquarelle) mais probablement un peu suicidaire pour l’industrie du jeu vidéo dans son ensemble.


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SimCity Social disponible sur Facebook !

Suite à l’annonce du jeu à l’E3 il y a quelques semaines, le jeu sur lequel j’ai travaillé avec le reste de l’équipe de Playfish Beijing est disponible depuis aujourd’hui sur Facebook.

C’est le premier titre de la série à être présent sur un réseau social, et sans être aussi complexe que les versions PC, le jeu est beaucoup plus stratégique que les autres city builders disponibles sur Facebook. J’espère donc qu’il saura être une bonne introduction à l’univers et au paradigme de SimCity, puisqu’un récent sondage indiquait qu’une majorité de joueurs potentiels n’avait jamais joué à un jeu de la série auparavant.

Jouer à SimCity Social sur Facebook.


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模拟时光, Les Sims en Chine !

Playfish vient de lancer son premier jeu sur un réseau social chinois, une adaptation de The Sims Social, lancé l’été dernier sur Facebook.  La version locale est le fruit du travail de Playfish Beijing qui y a ajouté du contenu localisé (vêtements, meubles…). Le jeu s’appelle 模拟时光 (Moni Shiguang), littéralement Temps de Simulation, la version PC originale étant connue sous le nom de Moni Rensheng, Vie de Simulation.

The Sims Social sur QQ (模拟时光)

Le jeu est accessible sur le réseau social de Tencent, Qzone, rattaché à la messagerie instantanée QQ. Qzone est un des principaux acteurs en Chine et Tencent évoquait 480 millions d’inscrits en mars 2011. Comme généralement en Chine, les chiffres sont à prendre avec des pincettes puisque même en admettant qu’ils soient corrects, rien n’indique combien des ces utilisateurs sont réellement actifs.

Jouer à The Sims Social sur QQ (nécessite un compte QQ. Des connaissances en mandarin sont préférables)